Mardi 4 octobre 2022 à 16h18
Paris, 4 oct 2022 (AFP) — L'Iran a fustigé mardi "l'hypocrisie" du président américain, Joe Biden, au lendemain de l'annonce de nouvelles sanctions contre Téhéran, en raison de la répression meurtrière des manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini il y a plus de deux semaines.
Au moins 92 personnes ont été tuées en Iran depuis le 16 septembre, selon l'ONG Iran Human Rights, basée à Oslo, tandis que les autorités avancent un bilan d'environ 60 morts parmi lesquels 12 membres des forces de sécurité. Plus d'un millier de personnes ont été arrêtées.
Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, est décédée trois jours après son arrestation pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique qui oblige notamment les femmes à porter le voile.
Sa mort a déclenché une vague de manifestations en Iran et des rassemblements de solidarité avec les femmes iraniennes à travers le monde.
"Cette semaine, les Etats-Unis vont imposer des coûts supplémentaires aux auteurs de violences contre des manifestants pacifiques", a prévenu lundi M. Biden dans un communiqué: "Nous continuerons à demander des comptes aux responsables iraniens et à soutenir le droit des Iraniens à manifester librement".
M. Biden n'a donné aucune indication sur les mesures envisagées contre l'Iran, déjà visé par de lourdes sanctions économiques américaines, en grande partie liées à son programme nucléaire controversé.
Téhéran a réagi mardi en dénonçant "l'hypocrisie" du président américain.
"Il aurait mieux fallu pour Joe Biden de réfléchir un tant soit peu au bilan de son pays en matière de droits humains avant de parler de la situation humanitaire (en Iran), même si l'hypocrisie ne requiert pas de profonde réflexion", a déclaré le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanani, sur Instagram.
"Le président américain devrait plutôt s'inquiéter des (conséquences des) nombreuses sanctions (...) contre la nation iranienne qui représentent clairement un exemple de crime contre l'humanité", a-t-il ajouté.
- "Etudiants poursuivis" -
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, s'en était déjà pris à Washington lundi, accusant les Etats-Unis et Israël -- deux ennemis jurés de l'Iran -- d'avoir fomenté le mouvement de contestation, le plus important dans le pays depuis celui de 2019 contre la hausse des prix de l'essence.
"Je dis clairement que ces émeutes et l'insécurité sont l'oeuvre des Etats-Unis, du régime sioniste (Israël, NDLR) usurpateur, leurs mercenaires et certains Iraniens traîtres qui les ont aidés à l'étranger", avait déclaré l'ayatollah Khamenei, 83 ans, dans sa première réaction aux manifestations.
Mardi, le chanteur iranien Shervin Hajipour, arrêté selon des ONG la semaine dernière après que sa chanson en faveur des manifestations est devenue virale, a été libéré sous caution, a annoncé un procureur local.
Des organisations de défense des droits humains ont dénoncé la répression violente notamment contre des étudiants lors d'incidents survenus dans la nuit de dimanche à lundi à l'Université de technologie Sharif à Téhéran, la plus prestigieuse d'Iran.
Iran Human Rights (IHR) a publié deux vidéos, l'une montrant apparemment des policiers à motos poursuivant des étudiants qui courent dans un parking souterrain, et l'autre, des policiers à moto emmenant des personnes dont la tête est recouverte de sacs en tissu noir.
Sur d'autres images, que l'AFP n'a pu vérifier de manière indépendante, on peut entendre des tirs et des cris alors qu'un grand nombre de personnes courent dans une rue la nuit.
La police anti-émeute a tiré des billes d'acier et des gaz lacrymogènes contre des étudiants qui scandaient "Femme, vie, liberté", "les étudiants préfèrent la mort à l'humiliation", selon l'agence de presse iranienne Mehr.
De son côté, le Canada a imposé de nouvelles sanctions contre des représentants iraniens, et le ministère britannique des Affaires étrangères a convoqué lundi le plus haut diplomate iranien à Londres.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.