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Début de combats entre troupes fédérales irakiennes et kurdes près de Kirkouk


Lundi 16 octobre 2017 à 02h34

Kirkouk (Irak), 16 oct 2017 (AFP) — Des militaires irakiens et kurdes ont fait état d'échanges de tirs d'artillerie dans la nuit de dimanche à lundi au sud de la ville de Kirkouk, après que les troupes fédérales ont progressé dans la province disputée.

Peu avant, la télévision officielle avait annoncé que les troupes gouvernementales avaient repris "sans combat" aux peshmergas kurdes de "larges zones" de la province. Des sources militaires des deux côtés ont rapporté des échanges de tirs de roquettes Katiousha au sud du chef-lieu de la province.

Le Premier ministre Haider al-Abadi, qui répète depuis plusieurs jours ne pas vouloir "mener une guerre" contre les Kurdes, avait "donné des ordres aux forces armées pour faire régner la sécurité à Kirkouk en collaboration avec les habitants et les peshmergas", selon la télévision officielle.

Les troupes irakiennes entendent "sécuriser les bases et les installations fédérales dans la province de Kirkouk", a indiqué le gouvernement. Elles doivent reprendre une base militaire et des champs pétrolifères que les combattants kurdes avaient pris il y a trois ans, dans le chaos créé par la percée fulgurante du groupe Etat islamique (EI).

M. Abadi a en outre précisé que les unités paramilitaires du Hachd al-Chaabi, dominées par les milices chiites soutenues par l'Iran, resteraient loin de la ville de Kirkouk, où plusieurs manifestations dénonçant leur participation aux mouvements ont eu lieu.

"Les unités du contre-terrorisme (CTS), la 9e division blindée de l'armée, et la police fédérale ont repris le contrôle d'importantes zones de (la province de) Kirkouk sans combat", a indiqué un général des CTS.

Cette avancée intervient après trois jours de face-à-face tendu entre troupes irakiennes et peshmergas kurdes et après l'expiration d'un délai supplémentaire accordé à ces derniers pour se retirer.

Un photographe de l'AFP a vu des colonnes militaires prendre la direction de Kirkouk.

Dans la ville même, le gouverneur de Kirkouk, Najm Eddine Karim, limogé par Bagdad mais qui refuse de quitter son poste, a appelé les habitants à prendre les armes pour défendre leur ville.

Peu après, le vice-président kurde Kosrat Rassoul, qui se déplace avec des cohortes de peshmergas, arrivait, en tenue militaire, à Kirkouk.

Depuis vendredi, les forces irakiennes avaient repris certaines bases désertées peu avant par les peshmergas.

- 'Déclaration de guerre' -

Les forces irakiennes se dirigent vers la base "K1" de la 12e division de l'armée irakienne dont les peshmergas s'étaient emparés en juin 2014 peu après la chute de Mossoul aux mains des jihadistes du groupe Etat islamique (EI).

Elles se dirigent également vers les champs de pétrole de Kirkouk, tenus par les forces du gouvernement à Bagdad jusqu'à ce qu'en 2008, les Kurdes prennent le contrôle de celui de Khormala. Et en 2014, ils se sont également emparés de ceux de Havana et Bay Hassan.

Les trois champs pétroliers de Kirkouk fournissent 250.000 barils par jour sur les 600.000 b/j de pétrole produits, dont 550.000 b/j sont exportés par le Kurdistan irakien en dépit du refus de Bagdad.

Le Kurdistan, qui traverse la plus grave crise économique de son histoire, pourrait lourdement pâtir de la perte de ces champs qui assurent 40% de ses exportations pétrolières.

A côté de "K1" se trouve une raffinerie au nord-ouest de Kirkouk. Les troupes irakiennes entendent également reprendre l'aéroport mitoyen.

Plus tôt dimanche, le gouvernement irakien avait changé de ton en accusant les Kurdes de chercher à déclarer la guerre avec la présence dans la province disputée de Kirkouk de combattants du PKK, considéré comme "terroriste" par Ankara et Washington.

Le Conseil de la sécurité nationale, la plus haute instance de la Défense en Irak présidée par M. Abadi, avait dit dans un communiqué y voir "une déclaration de guerre".

Des responsables kurdes ont démenti une présence du PKK, mais l'un d'eux a reconnu qu'il y avait des "sympathisants" de cette formation à Kirkouk, des "volontaires" qui combattaient le groupe Etat islamique (EI).

- Pas de pré-conditions au dialogue -

La déclaration du Conseil de sécurité irakien intervient juste après une réunion des dirigeants kurdes qui ont refusé d'annuler le référendum d'indépendance comme condition à des négociations comme le réclame Bagdad.

Dans la soirée, un responsable kurde a indiqué, sous le couvert de l'anonymat, qu'une dizaine d'habitations de familles kurdes avaient été incendiées à Toz Khormatou, accusant des unités turkmènes, une importante communauté de la ville à 75 km au sud de Kirkouk, du Hachd. Des affrontements armés entre le Hachd et les peshmergas secouent cette ville depuis vendredi.

Bagdad, en crise ouverte avec Erbil depuis la tenue le 25 septembre du référendum d'indépendance y compris dans des zones disputées comme Kirkouk, a multiplié les mesures économiques et judiciaires pour faire plier le Kurdistan.

Selon Erbil, l'Iran a en outre fermé sa frontière avec le Kurdistan, ce que Téhéran a démenti.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.